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vendredi 11 avril 2014

成语

Aujourd'hui, j'ai envie de faire un peu de littérature. Alors, je vous ai traduit de petites histoires. Ce sont des histoires connues en Chine comme les fables de La Fontaine en France. Les Chinois utilisent certaines phrases tirées de ces histoires comme proverbe ou comme expression toute faite, comme nous nous disons "il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué" ; merci Monsieur de La Fontaine. 
C'est moi qui ai traduit, alors il est possible que ça soit approximatif, ou quelque peu modifié. Je voulais que ça reste sympa en français, alors dites-moi !

守株等兔 : Vivre sans innover, c'est attendre un lapin

Un jour, un paysan travaillait dans son champ, quand tout à coup, il voit surgir un lapin des buissons. L'animal court, court et, maladroit, se heurte à une souche d'arbre qui se trouvait là. Il se cogne si fort qu'il se brise la nuque et meurt. Le paysan, trop heureux de cette proie tombée du ciel, laisse tomber tous ses outils, récupère le lapin et rentre chez lui pour en faire un bon dîner.
"Après tout, se dit-il, si un lapin peut mourir comme ça, aussi facilement, pourquoi est-ce que ça ne pourrait pas se reproduire ? Travailler, c'est difficile et parfois incertain, je n'ai qu'à attendre et la nourriture viendra se cogner toute seule à ma souche d'arbre."
Le paysan retourna dans son champ et, au lieu de travailler, il attendit patiemment qu'un autre lapin se montre. Il attendit longtemps, très longtemps, mais aucun lapin ne se montra plus jamais et toute la contrée se moqua bien de lui.
Moralité : gouverner sans innover, c'est attendre un lapin.


刻舟求剑 : Marquer un bateau pour se souvenir d'un emplacement

Un jour, un homme était dans un bateau. Le bateau tangue et il échappe son épée dans l'eau. Alors, pour ne pas oublier, il écrit au fond du bateau : "c'est ici que j'ai fait tomber mon épée." Le bateau accosté, il descend et se met à chercher au pied du bateau son épée perdue. Mais il ne s'était pas aperçu que le bateau s'était déplacé mais que l'épée n'avait pas bougé ! Difficile de ne pas rire de cet homme, n'est-ce pas ?
Et bien, gouverner un pays sans jamais rien changer, ni dans ses lois ni dans sa politique publique, c'est la même chose. Notre siècle a déjà bien changé, si le gouvernement ne change pas avec lui, il va avoir des ennuis !
Un jour, un homme passe sur un pont et voit un autre homme en train de mettre un nouveau-né à l'eau. Il va voir l'autre et lui demande ce qu'il fait, car l'enfant criait à pleins poumons." Son père est très bon nageur", lui dit-il. Son père, effectivement, avait appris à nager, il et nageait bien, mais peut-on en déduire que son fils nagera aussi bien que lui ?
Déduire, de la même manière, qu'une chose se produira à coup sûr parce qu'une autre lui ressemblant énormément s'est déjà produite, c'est totalement absurde. Toutefois, dans notre pays, c'est comme ça qu'on gouverne.



Ces petites histoires sont des classiques en Chine, elles ont été écrites au troisième siècle avant Jésus-Christ si je ne me trompe pas... Comme quoi, la véracité des histoires ne dépendent pas de l'époque à laquelle elles ont été écrites ! 
Dites-moi si elles vous ont plu, j'essaierai d'en trouver d'autres intéressantes !

samedi 29 mars 2014

洗衣机

Aujourd'hui, parlons de la Chine accompagnés d'un peu de littérature ! Tout d'abord, la littérature écrite en France, par notre bon Monsieur de La Fontaine. Ensuite, votre humble serviteur, qui vous propose un peu d'exotisme asiatique. Excusez la trivialité du propos.

Un souriceau tout jeune, et qui n'avait rien vu
Fut presque pris au dépourvu.
Voici comme il conta l'aventure à sa mère.
J'avais franchi les monts qui bornent cet État
Et trottais comme un jeune Rat
Qui cherche à se donner carrière,
Lorsque deux animaux m'ont arrêté les yeux ;
L'un doux, bénin et gracieux,
Et l'autre turbulent et plein d'inquiétude.
Il a la voix perçante et rude ;
Sur la tête un morceau de chair,
Une sorte de bras dont il s'élève en l'air,
Comme pour prendre sa volée ;
La queue en panache étalée.
Or c'était un Cochet1 dont notre Souriceau
Fit à sa Mère le tableau,
Comme d'un animal venu de l'Amérique.
Il se battait,dit-il, les flancs avec ses bras,
Faisant tel bruit et tel fracas,
Que moi, qui grâce aux Dieux de courage me pique,
En ai pris la fuite de peur,
Le maudissant de très bon cœur.
Sans lui j'aurais fait connaissance
Avec cet Animal qui m'a semblé si doux.
Il est velouté comme nous,
Marqueté, longue queue, une humble contenance,
Un modeste regard, et pourtant l’œil luisant :
Je le crois fort sympathisant
Avec Messieurs les rats ; car il a des oreilles
En figure aux nôtres pareilles.
Je l'allais aborder, quand d'un son plein d'éclat
L'autre m'a fait prendre la fuite.
Mon fils, dit la souris, ce doucet est un Chat,
Qui sous son minois hypocrite,
Contre toute ta parenté
D'un malin vouloir est porté.
L'autre animal tout au contraire,
Bien éloigné de nous malfaire,
Servira quelque jour peut-être à nos repas.
Quant au chat, c'est sur nous qu'il fonde sa cuisine.
Garde-toi, tant que tu vivras,
De juger des gens sur la mine.

1C'est un petit coq.

L'autre jour, en entrant dans la buanderie, j'avais les pieds mouillés. C'est avec tristesse que je constatais que la machine à laver essayait de se remplir depuis un petit moment, sans y parvenir. Il y avait une fuite. Il a donc fallut téléphoner à la propriétaire pour qu'elle vienne voir. En Chine, apparemment, ce sont les propriétaires de l'appartement qui sont également propriétaires des machines à laver (ou du moins c'est comme ça chez nous). C'était déjà un bon point car, quitte à la changer, je préfère que ce soit ma propriétaire qui règle l'addition. Toutefois, celle-ci, comme n'importe qui, voulait essayer de la réparer avant de se résigner à s'en débarrasser. Elle appelle donc un premier plombier, avec qui elle se fâche parce qu'il lui dit qu'il faut changer le robinet d'arrivée d'eau qui est trop vieux. Force était de constater que c'était le cas. Aussi, elle se décida à le changer, mais pas en rappelant le premier plombier. Elle les paie pour travailler, pas pour se faire engueuler.
Ainsi, un beau jour de printemps, ma propriétaire toque à la porte. Elle est accompagnée d'un homme en costume de ville, ni trop sérieux, ni trop détendu. Il va, les mains dans les proches, dans la buanderie et regarde le robinet avec ma propriétaire. Celle-ci lui présente un robinet neuf qu'elle a acheté et lui le retourne dans tous les sens. Il grogne quelque chose entre ses dents. Le trou n'est pas assez gros pour l'arrivée d'eau, et faudrait quelque chose pour l'agrandir. Malheureusement, à part les ciseaux de ma colocataire ou le couteau qu'on utilise pour couper le saucisson que ma mère m'a envoyé, nous n'avons pas beaucoup d'outils à l'appartement. Tant pis, la propriétaire doit ressortir (seule) pour acheter le modèle qui convient. Petit interlude d'un quart d'heure, pendant lequel notre homme regarde les gens passer dans la rue en bas de chez nous, découvre avec surprise que l'interrupteur de la buanderie allume... l'ampoule de la buanderie... Finalement, la propriétaire revient toute essoufflée. Elle a changé le robinet.
Et bien, croyez-moi ou pas, ce n'est que lorsqu'il a réussi à installer ce robinet que j'ai compris que cet homme était notre plombier.
Moralité : ne jugez rien sur les apparences. La machine à laver fuit toujours.

dimanche 16 février 2014

不用客气

Ma mère et ma sœur sont venues, la semaine dernière, me rendre visite. J'aime l'Asie depuis un petit moment ; les mœurs des Chinois m'ont surprise, mais c'était comme de manger une tarte aux pommes pour la première fois : je connaissais le goût des pommes, mais pas celui de la tarte. Il n'y a pas eu de révolution, pas de révélation, juste quelques surprises et des ressemblances. En revanche, pour ma mère et ma sœur, voyager en Chine, c'était vraiment avoir la tête à l'envers. Et la chose qui les a le plus choquées, c'est la politesse des Chinois. Je crois qu'elle vaut le détour.


En France, la politesse s'assimile à une liste de règles. La politesse, c'est l'étiquette. « Fais pas ci, fais pas ça, viens ici, mets-toi là... » chante la chanson. Pour les Français, être poli, c'est respecter les règles. On met les mains sur la table, on ne double pas dans les files d'attente, on dit bonjour, merci, au revoir... Pourquoi ? Les Français répondent seulement « parce que sinon, c'est malpoli. » Qu'on leur demande de justifier leurs règles, et ils avouent facilement qu'elles sont ridicules, mais qu'elles leur restent indispensables, qu'ils ne peuvent pas s'en passer. Les Français jugent énormément sur ce critère les gens qu'ils rencontrent. Parmi les conseils que les professeurs donnent à leurs étudiants pour bien réussir leurs examens, on retrouve des conseils de politesse : s'habiller convenablement, dire bonjour et au revoir, ne pas ignorer l'examinateur, ne pas manquer de respect. Lorsque nous nous retrouvons devant notre futur employeur, il nous faut adopter la même conduite. Toujours rester polie est, je crois, le conseil que j'ai le plus entendu dans ma vie, que ce soit de la part de mes parents ou de mes professeurs. La politesse est quelque chose sur lequel les Français ne plaisantent pas.

Alors, fatalement, quand ils viennent visiter la Chine, ils sont souvent offusqués par certaines coutumes chinoises.

Les Chinois doublent dans les files d'attente. Les Chinois mangent le nez dans leur bol, avec leurs doigts et crachent ce qu'ils ne peuvent pas manger sur la table. Les Chinois, d'ailleurs, crachent dans la rue, quand ils ne se mouchent pas à la façon des rugbymen. Le matin, quand ils arrivent dans leur classe, avant que le cours ne commence, ils ne se disent pas spécialement bonjour, ils enchaînent sur le sujet de la conversation. La liste est longue, et je ne voudrais pas choquer mon lecteur... Toutefois, quoiqu'il en pense, les Chinois sont polis. La politesse chinoise existe, mais elle est difficile à comparer avec la politesse française. Si les Chinois doublent dans la file d'attente, c'est parce qu'ils veulent juste poser une question à la caissière. Ils mangent le nez dans leur bol parce que c'est plus pratique. Ils jettent leurs papiers dans la rue parce qu'ils savent qu'il y a quelqu'un pour les ramasser (et c'est vrai, la Chine possède une armée de balayeur qui passe ses journées à ramasser la moindre miette au sol). Non, en Chine, la politesse n'est pas une règle, et c'est pour ça que la plupart des Chinois osent enfreindre les règles : ils savent que s'ils font quelque chose de vraiment contraire aux règles, quelqu'un leur rappellera qu'il ne faut pas faire ça (les employés du magasin, du métro, les balayeurs dans la rue, voire les policiers... les représentants de l'ordre ne manquent pas en Chine). Leur politesse consiste surtout en un savoir-vivre avec les autres. Les Chinois font preuve d'un grand égoïsme à certains égards : ils poussent dans le métro, dans la rue pour pouvoir passer, ils prennent les plus grosses parts du plat etc. Mais je pense que s'ils agissent comme ça c'est parce qu'ils savent que s'ils agissaient en fonction des autres, leur vie serait insupportable. Dans une ville de plus de huit millions d'habitants, quand on est pressé, on déteste les politesses devant les marches de l'escalator, ou dans la porte de métro. Quand on est perdu, on est heureux de ne pas avoir à réfléchir avant d'aborder quelqu'un pour lui demander son chemin, n'importe qui fait l'affaire, on ne dérange vraiment personne. La clé de la politesse des Chinois est la réponse aux deux questions « qu'est-ce qui est le mieux pour moi ? Qu'est-ce que je peux faire pour les autres ? »


Les Français, avant de faire quoi que ce soit, se demandent « est-ce que c'est poli ? », passent dans leur tête la liste des règles de politesse qu'ils connaissent et agissent en fonction de la réponse à cette question. Les Chinois réfléchissent peu avant d'agir : ils savent où s'arrête leur intérêt et où commence celui des autres. Être poli en Chine c'est savoir être égoïste et philanthrope en même temps.